Alexandre Pétion, Président d'Haïti |
Simon Bolivar, libérateur d'Amérique du Sud |
Lettre de Simon Bolivar au Président haïtien Alexandre Pétion l'annonçant sa volonté de visiter Haïti à la recherche d'appuis financiers et militaires pour libérer le Venezuela et la Nouvelle Grenade (la Colombie et l'Equateur).
Kingston, le 19 décembre 1815.
À Mr. le Président Pétion,
Chef Suprême de la République d’Haïti.
Monsieur le Président:
Depuis bien longtemps j’ambitionne l’honneur d’être en communication avec
Votre Excellence, et de lui témoigner les profonds sentiments d’estime et de
reconnaissance, que m’ont inspiré ses talents distingués, et ses bienfaits
sans nombre envers mes trop malheureux compatriotes ; mais j’ai toujours craint
d’importuner Votre Excellence en détournant un seul instant son attention des
soins importants qui l’occupent.
Les circonstances, Mr. le Président, me forcent, heureusement pour moi, à me rendre dans l’asile de tous les républicains de cette partie du monde : je
dois visiter le pays que Votre Excellence rend heureux par sa sagesse. II faut
que je retourne dans ma patrie en passant par celle de Votre Excellence ; et
puisque la fortune me présente l’inappréciable occasion de la connaitre et de
l’admirer de prés (si elle veut bien me le permettre) je me rendrai auprès
d’elle dans le moment même où j’arriverai aux Cayes, où quelques-uns de mes
amis m’attendent pour traiter avec moi sur les affaires de l’Amérique du Sud.
Je me flatte, Mr. le Président, que l’affinité de nos sentiments pour
défendre les droits de notre patrie commune, m’attireront auprès de Votre
Excellence les effets de son inépuisable bienveillance envers tous ceux qui n’y
ont jamais vainement recouru.
J’ai l’honneur d’être avec la plus haute considération, Monsieur le
Président, de Votre Excellence le très humble et très obéissant serviteur.
SIMÓN BOLÍVAR.
Certifié conforme á l’original. Le Secrétaire Général B. Inginac.
TRADUCCIÓN
Kingston, 19 de Diciembre de 1815.
Al Señor Presidente Petión,
Jefe Supremo de la República de Haití.
Señor Presidente:
Hace mucho tiempo que ambiciono el honor de ponerme en comunicación con V.
E. y de manifestarle los profundos sentimientos de estima y reconocimiento que
me han inspirado sus distinguidas dotes y sus innumerables bondades hacia mis
muy desdichados compatriotas; pero siempre he temido importunar a V. E.
distrayendo su atención por un solo instante de los importantes cuidados que la
ocupan.
Las circunstancias, señor presidente, me obligan, afortunadamente para mí,
a dirigirme al asilo de todos los republicanos de esta parte del mundo: debo
visitar el país que V. E. hace feliz con su sabiduría. Para regresar a mi
patria debo pasar por la de V. E.; y ya que la fortuna me ofrece la
inapreciable ocasión de conocer y admirar de cerca a V. E. (si V. E. tiene a
bien permitírmelo) iré a presentarme a V. E. en el momento mismo en que llegue
a los Cayos, donde algunos de mis amigos me aguardan para tratar conmigo los
asuntos de la América del Sur.
Tengo la esperanza, señor presidente, de que nuestra afinidad de
sentimientos en defensa de los derechos de nuestra patria común me granjeará
por parte de V. E. los efectos de su inagotable benevolencia hacia todos
aquellos que nunca recurrieron a ella en vano.
Tengo el honor de ser de V. E. con la mayor consideración, señor
presidente, su muy humilde y obediente servidor.
SIMÓN BOLÍVAR.
Certificado conforme al original.
El Secretario General B. Inginac.