La République d'Haïti, a soutenu les Dominicains par la fourniture d'hommes et un support logistique. Le gouvernement haïtien voyait en l'annexion de la jeune République Dominicaine par l'Espagne, le rétablissement de l'esclavage à l'Est et la présence de troupes madrilènes à ses portes, comme une menace pour son intégrité territoire et sa souveraineté. Pour cela, Haïti a notamment accueilli à Jacmel « les généraux Sanchez, José Maria Cabral, Pedro Alejandrino Ramirez Baez et Manuel Maria Gautier, qui traversèrent la frontière pour aller combattre les troupes espagnoles » (Price-Mars, 1953). Port-au-Prince a également accordé l'asile politique aux insurgés dominicains persécutés. Le capitaine-général de Cuba et représentant du Roi d'Espagne, Francisco Serrano y Domínguez, a décidé de punir le gouvernement du président Fabre Nicolas Geffrard en chargeant le l'amiral Rubalcava de la tache de bombarder les principales villes d'Haïti, y compris la capitale sauf en cas de payement d'une indemnité de 200 000 piastres et un salut de 21 coups de canons au fanion espagnol. Face à l'arrivée de l'armada espagnole le 6 juillet 1861, Haïti a été obligée de payer après d'âpres négociations 25 000 piastres à l'Espagne pour son soutien aux indépendantistes dominicains. Un salut humiliant de 21 coups de canons a été donné au drapeau espagnol. Retrouvez ci-dessous la lettre du capitaine-général de Cuba à l'amiral Rubalcava.
Votre Excellence se rendra à Santo-Domingo avec quelques-unes de nos unités navales et, réunies à celles qui y sont déjà, elle détachera celles qui lui sont nécessaires pour entreprendre des opérations hostiles sur Port-au-Prince et sur d'autres points vulnérables des côtes d'Haïti en suivant les indications ci-après :1° Votre Excellence se rendra sur Santo-Domingo de l'Ozama et là elle s'enquerra de l'état des choses en conférant avec les autorités et chefs des troupes, et en prenant les dispositions qu'elle jugera les plus convenables pour le succès de son entreprise, elle tiendra compte des circonstances dont elle tirera le meilleur parti.2° Si les troupes haïtiennes ont envahi le territoire et qu'elles y poursuivent les hostilités, Votre Excellence se dirigera immédiatement sur Port-au-Prince avec les navires qu'elle croira nécessaires et ouvrira les hostilités sur tel point déterminé pour y détruire les batteries et les forteresses en produisant le plus de dommages possibles - les avis et intimations usuels ayant été prodigués aux résidents étrangers.3° La même opération sera pratiquée à Jacmel, au Cap-Haïtien et en d'autres points vulnérables de la côte, toujours avec l'idée de causer le plus grand dommage à l'ennemi.4° En temps opportun, Votre Excellence prendra les dispositions convenables afin que soient appréhendés les bateaux de guerre, de cabotage et de toute classe portant pavillon haïtien et les conduira à l'un des ports espagnols des Antilles.5° Si, comme il est présumable, lorsque Votre Excellence arrivera à Santo-Domingo de l'Ozama, l'invasion du territoire a été repoussée et châtiée par terre, V.E. ne sera pas dispensée pour cela d'opérer par mer contre les Haïtiens. Mais, dans ce cas, avant de commencer les hostilités, Votre Excellence fera aboutir au Président Geffrard un ultimatum en termes énergiques exigeant de lui dans un délai limité la réparation complète des offenses reçues et une garantie suffisante pour l'avenir. En cas de refus, ou que la réponse faite à V.E. ne lui paraisse pas satisfaisante, elle fera descendre notre pavillon de la maison consulaire et les intimations ordonnées selon qu'il est prévu en l'art. 2o, V.E. procédera aux hostilités dans la forme indiquée dans le même article.6° Le Consul de S.M. [Sa Majesté, ndlr] en Haïti et Don Manuel Cruzat, qui a été aux ordres de V.E. durant sa première expédition à Santo-Domingo, l'accompagneront cette fois afin que sous sa direction et selon les instructions de V.E., ils lui prêtent les services qu'exigent les circonstances.
7° Durant le cours des opérations il est très convenable, et je recommande à V.E. de travailler en harmonie avec les autorités et les chefs des armées de S.M. à Santo-Domingo et, toujours autant que cela est possible, avec le digne général Santana.
Source : Jean-Price Mars, La République d'Haïti et la République dominicaine. Les aspects divers d'un problème d'histoire, de géographie et d'ethnologie. Tome II (1953)