Monsieur le Comte,
L'indisposition goutteuse du Roi a tant diminué, que Sa Majesté a déjà fait annoncer un lever pour mercredi prochain.
Nous sommes privés des malles du Continent, et les notions des rives opposées se bornent à confirmer l'activité, qui y règne dans les différents ports, ou les armements destinés contre l'Angleterre sont rassemblés.
L'Amiral Cornwallis a, par un ouragan récent, été obligé de quitter sa station devant Brest, mais on l'a depuis rencontré dans une direction propre pour la regagner.
II est enfin avéré que l'isle de Saint-Domingue est entièrement abandonnée à la domination des Nègres. Les forces françaises, sous les ordres du Général Rochambeau au Cap Français, réduites au nombre de 4 à 5 mille hommes entourées par les rebelles et bloquées par les Anglais se sont rendues aux derniers et ont été transportées à la Jamaïque.
Cette nouvelle ne laissera pas de causer une sensation douloureuse en France. Sous ce point de vue et comme une victoire militaire, elle est applaudie en Angleterre, mais l'évènement est certes au reste d'une nature à mériter la plus sérieuse attention du Gouvernement Britannique et à donner de l'inquiétude pour l'avenir au grand nombre d'intéressés aux possessions importantes de cette partie du monde. La Jamaïque, se trouvant la plus exposée à l'infection, nécessitera une surveillance particulière.
Le Gouvernement batave s'étant constamment refusé à la réciprocité de recevoir un Commissaire anglais pour l'échange des prisonniers, il a été enjoint à Mr. Aposteel qui résidait ici dans cette qualité, de quitter ce Royaume, et le Lord Hawkesbury lui a expédié un passeport pour cet effet. J'apprends qu'il est déjà parti de cette Capitale.
J'ai l'honneur d'être avec la plus haute considération.
Monsieur le Comte
de Votre Excellence
Le très humble et très obéissant serviteur
Comte de Wedel Jarls
À Son Excellence
Monsieur le Comte de Bernstorff
Ministre d'État, Conseiller privé du Roi